Une fiscalité favorable aux très riches
Sarkozy promet beaucoup et à tout le monde. Et si l’on en croit les sondages – mais faut-il encore croire les sondages ? – nombreux sont les français qui semblent séduits par ses promesses. C’est un fait que le candidat UMP a l’art de laisser croire à chacun qu’il s’occupera bien de lui. Pourtant, si l’on examine quelques-unes de ses propositions fiscales sur lesquelles il communique le plus, la réalité est toute autre. Illustration :
1- Baisser le seuil du bouclier fiscal à 50% :
Il s’agit de ne pouvoir prélever en impôts (impôts sur le revenu, taxes foncières et d’habitation, ISF, CSG et RDS) plus de 50% des revenus d’un foyer fiscal. Notons d’abord que la réforme fiscale de 2005 a déjà instauré un bouclier fiscal à 60% (et qui n’incluait pas CSG et RDS) et qu’une telle mesure se situe donc dans l’exacte continuité de la politique menée ces cinq dernières années. De plus, elle ne concernerait que moins de 20.000 foyers fiscaux (sur 34 millions) parmi les plus aisés. Pour exemple, un salarié célibataire déclarant un revenu annuel de 100.000 euros devra posséder un patrimoine de près de 3 millions d’euros pour pouvoir bénéficier de la mesure. Autant dire que le bouclier fiscal, que M. Sarkozy ne craint pas de vendre comme une mesure de justice sociale, concerne pour l’essentiel une infime minorité de contribuables les plus riches. Cela coûterait 2 milliards d’euros à l’Etat, soit près de la moitié des recettes de l’ISF.
2- Déduire jusqu’à 50.000 euros du montant de l’ISF pour ceux qui investissent dans une PME :
L’ISF concerne les contribuables disposant d’un patrimoine total supérieur à 750.000 euros – soit moins de 500.000 foyers fiscaux sur 34 millions. Pour atteindre le plafond de 50.000 euros déductibles de l’impôts, il est nécessaire de disposer d’un patrimoine supérieur à 6 millions d’euros. Or 95% des foyers assujettis à l’ISF sont en dessous de ce seuil, lesquels donc seraient donc de fait exonérés de l’ISF. Les 5% restants étant concernés par la mesure précédente – le bouclier fiscal -, M. Sarkozy propose de fait, bien qu’en prétendant le contraire, de supprimer purement et simplement l’ISF.
3- Baisser de 4 points les prélèvements obligatoires et « rendre 68 milliards aux français » :
La mesure a été analysée dans un autre article, où l’on a montré comme il s’agit là encore d’une mesure qui concernerait pour l’essentiel les plus riches et qui mettrait à mal le principe même de la solidarité républicaine – voir Sarkozy ou l’injustice fiscale. Qui plus est, passé l’effet d’annonce de la mesure et confronté à l’impossibilité de la financer, M. Sarkozy ne parle plus aujourd’hui que de 20 à 30 milliards dans un programme de réduction d’impôts qui ne débuterait qu’après 2010 et qui s’étalerait sur une période de six à sept années… En bref, cela ne concerne pas le mandat présidentiel à venir (2007-2012) – voir Sarkozy revient sur sa promesse de baisse des impôts
4- Déduire de l’impôt les intérêts d’emprunt pour l’acquisition d’une résidence principale :
Il s’agit de favoriser l’accès à la propriété aux classes moyennes, mesure mise en place par la gauche au début des années 1990 et supprimée par Alain Juppé en 1997. Dix ans plus tard, la mesure est minimaliste et il s’agit aujourd’hui de la comparer avec la proposition de Mme Royal d’une extension des prêts à taux zéro…
5- Supprimer l’impôt sur les successions :
Etrange proposition pour quelqu’un qui prétend récompenser « la France qui travaille« . Mais là encore, cela ne concerne qu’une minorité de contribuables : en 2005, sur 537.000 décès, seules 140.000 déclarations de successions imposables ont été enregistrées, sachant par ailleurs que les abattements sur les droits de succession sont déjà très importants : 75.000 € pour le conjoint survivant, 50.000 € par enfants… et depuis 2005, 50.000 € de plus en abattement global. Un exemple suffira pour comprendre quelle catégorie de français est concerné par cette mesure : au décès d’un des deux parents dans une famille comptant deux enfants, des droits de succession ne sont dus qu’au-delà de 200.000 € hérités – dit autrement, jusqu’à 200.000 € vous n’êtes pas imposable au titre de la succession. La suppression proposés par M. Sarkozy concerne les autres qui héritent de bien d’avantage.
Il y a de vraies mesures derrière les beaux discours du candidat Sarkozy, et des mesures qui démentent largement ce que tentent de laisser croire ses discours en trompe-l’oeil. La politique que souhaite mettre en oeuvre M. Sarkozy se situe dans la continuité de celle qui est menée en France par l’UMP depuis cinq années, et qui vise à favoriser d’abord les plus riches. Derrière cette politique, il y a l’éternel – et de plus en plus incertain – credo libéral de l’économie des retombées : Laissons la richesse à ceux qui sont riches, la main invisible se chargera de la répartir mieux. Le moins qu’on puisse constater est que la fameuse « main invisible » n’est pas des plus zélées et que si les plus riches sont servis par cette politique, les autres en restent toujours à avaler leur bulletin de vote.
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On parle de : Le programme fiscal de Sarkozy : êtes-vous vraiment concernés ?