Avr 092007
 

Azouz Begag, plus « arabe de service » que Ministre de la République ?

Un ministre de la République démissionne à grand fracas du gouvernement à la veille des élections présidentielles et publie dans la foulée un livre intitulé Un mouton dans la baignoire dans lequel, entre autres choses, il raconte que l’ex-ministre de l’Intérieur, actuel candidat à la Présidence de la République, l’a insulté – Tu es un connard, un déloyal, un salaud ! – et menacé de représailles physiques – « Je vais te casser la gueule » ; on s’attendrait à ce que le monde médiatique soit en émoi, que l’information fasse les gros titres, que les journalistes tentent d’en savoir davantage, enquêtent, posent des questions, s’interrogent, fassent leur boulot en somme. Mais non, il ne se passe pas grand chose. Service minimum. Visiblement, « on » a choisi de ne pas faire trop de vagues. Alors le citoyen s’interroge : la pluralité de la presse est-elle en France si mal en point que les journalistes n’osent plus, ou ne peuvent plus faire déontologiquement leur travail ? Notre démocratie est-elle déjà à se point gangrénée, en état de décomposition avancée ? Car, on le sait bien, quand la presse n’est plus tout à fait libre, ce sont nos libertés individuelles qui sont menacées.

Un ex-ministre, tout juste démissionnaire, explique qu’un autre ex-ministre, candidat à la Présidence de la République, l’a insulté et menacé. Mais voilà, l’un se nomme Azouz Begag (faut-il prendre un arabe au sérieux, fut-il ministre ?) et l’autre Nicolas Sarkozy (faut-il se fâcher avec un homme qui a le bras si long, la rancune si tenace et une conception de la liberté de la presse toute personnelle ?), et voilà cette presse, qui n’en manque jamais une occasion de faire des gorges chaudes de son indépendance, qui se couche lamentablement, évoque rapidement le sujet et passe rapidement à autre chose en serrant les fesses. Mais au-delà de cette pitoyable démission, c’est le scandale qu’il est nécessaire de souligner.

On se souvient en effet des chous-gras dont cette même presse s’était empressé de faire lorsque Eric Besson a publié son brûlot contre Ségolène Royal.

Et puis on se souvient des procès en incompétence qui ont été dressés à l’encontre de cette même Ségolène Royal, et du silence assourdissant autour des déclarations d’un Nicolas Sarkozy encore Ministre de l’Intérieur et néanmoins incapable de dire si les dirigeants d’Al Qaïda étaient sunnites ou bien chiites, pour ne citer que cet exemple.

On se souvient également qu’après avoir glosé pendant de longues semaines sur un programme de Ségolène Royal, qu’on en finissait pas d’attendre, disait-on, il n’y eut pas un mot concernant celui de Nicolas Sarkozy qui n’a finalement été publié que… il y a moins de dix jours !!!

Et puis il y a eu ce comuniqué de presse de la Société des Journalistes de France 3, dénonçant les propos tenus par M. Sarkozy à l’égard d’une rédaction qu’il fallait selon lui « virer » : »Je ne peux pas le faire maintenant. Mais ils ne perdent rien pour attendre. Ca ne va pas tarder« . On n’a alors que peu entendu leurs confrères, à ces journalistes-là. Peu se sont empresser pour relayer leur déclaration d’indépendance. Soudain, la solidarité professionnelle n’a plus exister et chacun de baisser pudiquement les yeux, gardand des doigts tremblants sur la couture de pantalons qu’on devine dégoulinants.

Tout récemment, Nicolas Sarkozy dérape vers l’eugénisme, évoque sa conviction selon laquelle il y aurait pour l’homme un déterminisme génétique : « On nait pédophile« , ne craint-il pas d’affirmer. Le suicide chez les adolescents ? C’est « parce que, génétiquement, ils avaient une fragilité, une douleur préalable« . Bref, conclut-il, « la part de l’inné est immense« , rejoignant ainsi sans nuance des théories « sceintifiques » en vogue principalement au sein de l’extrême-droite et dont on connait les dérives potentielles. Là encore, service minimum de la part des médias traditionnels. On se garde bien d’appuyer, on évite de soulever la question, on contourne le débat. Surtout, pas de vagues…

Il semble même que le monde politico-médiatique dans son ensemble bruisse des colères et écarts de langages de M. Sarkozy, lesquels auraient tendance à se multiplier ces derniers temps. On en glose dans les salons et les dîners en ville, le candidat de l’UMP serait allé jusqu’à qualifier les citoyens en général, et les hommes de presse en particulier, « d’enc…« , dit-on dans les milieux informés. Et chacun là encore de préférer se taire. Mais passons…

Un ministre de la république, délégué auprès du Premier Ministre et chargé de la Promotion de l’Egalité des Chances, nous confie que son collègue de l’Intérieur l’a traité de « salaud« , a menacé de lui « casser la gueule« , lui a demandé de « ne jamais plus lui serrer la main à l’avenir« , évoque en prime le mépris dont lui témoignaient les proches du candidat de l’UMP, l’assaillant de violences verbales telles que « Allez, fissa, sors de là ! Dégage d’ici, je te dis, dégage !« , allant jusqu’à lui marcher volontairement sur les pieds ; pour dire les choses clairement, cet homme nous confie en réalité qu’il a été traité au sein même du gouvernement de la République comme un « sale arabe » – c’est-à-dire comme sont traités quotidiennement nombre de nos concitoyens dont les origines peuvent se retrouver de l’autre côté de la Méditerranée -, mais ça n’interpelle pas ceux qui sont chargés d’informer les citoyens et de les éclairer quant au choix qu’ils auront bientôt à faire à l’occasion des présidentielles. Ça s’appelle une démission, ça s’appelle baisser son pantalon, c’est une honte et c’est un scandale. Honte pour une profession et scandale pour notre démocratie.

Ils ne sont pas responsables ? Ce sont les patrons de presse qui sont aux ordres, eux qui définissent la politique éditorial de leurs canards ? Qu’à cela ne tienne : rien n’empêche les journalistes d’ouvrir « le blog de la presse libre » et d’y publier, éventuellement sous un pseudo, les articles et les reportages qu’on leur a refusés. Ou qu’ils les adressent à Agoravox. Après tout, les journalistes sont aussi des citoyens, non ?

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