Jan 282007
 

L’économie des retombées, d’après Russell Banks

portrait sarkozy« Si je pense que nos dirigeants sont cyniques ? Oui, honnêtement, je le pense. Il me semble, cependant, que leur système de croyances les persuade qu’ils oeuvrent pour le bien universel – que le bien universel leur demande de s’engager dans des actions qui les avantageront, eux en particulier. Je ne sais pas si vous connaissez une expression qu’employait Reagan, celle de « l’économie des retombées ». On croyait, et on le croit encore chez les républicains, que si l’on diminuait les impôts des riches, ces avantages finiraient par retomber sur les pauvres, qu’en somme les pauvres bénéficieraient de la réduction d’impôt dont avaient profité les riches. Un formidable fantasme. Très alléchant. Tout le monde attendait qu’un peu d’argent finisse par retomber. Bien entendu, comme cela ne se produisait jamais, on accordait une nouvelle réduction d’impôt aux riches. Et les riches disaient : Ne vous inquiétez pas, c’est l’économie des retombées ; ça va finir par arriver jusqu’à vous. Ils y croyaient. Les riches croient toujours que ce qui est bon pour eux est bon pour tout le monde. »

– dans Amérique, Notre Histoire : Russell Banks, entretien avec Jean-Michel Meurice –

Ce commentaire de Russell Banks est une parfaite illustration de ce qui forme l’essence même du discours sarkozyste, cette manière de nous présenter le prétendu cercle vertueux du libéralisme : favorisons les riches : ça finira par retomber sur les pauvres ; favorisons les entreprises : ce sont les salariés qui en bénéficieront ; favorisons le fort : le faible ne s’en portera que mieux ; réduisons les impôts : les rentrées d’argent seront plus importantes ; facilitons le licenciement : les chômeurs trouveront un emploi ; accroissons la flexibilité du travail : la précarité reculera ; etc…

C’est une économie de faux-semblants. Et en attendant que « ça » retombe, les riches deviennent plus riches, les forts deviennent plus forts…, et ce sont toujours les mêmes qui attendent, ceux qui ont de moins en moins la possibilité d’attendre, ceux pour qui attendre est tout simplement une souffrance supplémentaire.

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