Nicolas Sarkozy a proclamé : « On en a plus qu’assez d’avoir en permanence le sentiment de s’excuser d’être français. On ne peut pas changer ses lois, ses coutumes parce qu’elles ne plaisent pas à une infime minorité. Si certains n’aiment pas la France, qu’ils ne se gênent pas pour la quitter«
Passons rapidement sur cette drague éhontée des électeurs d’extrême droite en empruntant sur ces thèmes, la ficelle est bien grosse et manque dramatiquement de subtilité, et interrogeons-nous sur ce que cela signifie, aimer ou ne pas aimer la France.
La France, de quoi parle-t-on ? On n’imagine pas que Sarkozy rendait là et seulement un hommage bucolique à la sublime diversité de nos paysages. Alors de quoi parlait-il ? De la grandeur de la France, ce qu’elle a représenté dans l’Histoire des Nations ? La France des Lumières et de la Révolution, terre d’accueil et d’universalité, patrie des Droits de l’Homme : certes, on peut aimer cette France-là, et aussi s’interroger sur ce qu’il reste aujourd’hui de ce lustre d’antan que nous avons coutume d’observer avec une tendre et impardonnable complaisance, oubliant allègrement la part d’ombre : la France de la terreur, la France esclavagiste, la France de Pétain et de Laval, la France antisémite, la France colonialiste, la France raciste et repliée sur elle-même.
Et aujourd’hui, est-elle tellement aimable, la France ? La France, c’est aussi ce pays qui vote à 20% pour l’extrême droite, ce pays qui parque ses immigrés, et les enfants de ses immigrés, et les enfants de leurs enfants, en périphérie des grandes villes, ce pays dans lequel il est si difficile de trouver un travail et un logement lorsque l’on a des origines africaines un peu trop marquées, ce pays qui en vérité exclut bien plus qu’il n’accueille, ce pays qui a peur de sa diversité c’est-à-dire de son propre reflet. Aimer la France ou la quitter ? Il y a peut-être une alternative : aimer la part de lumière et rejeter la part d’ombre, aimer suffisamment l’une pour ne pas passer l’autre sous silence, vivre à l’endroit où l’on se trouve et vouloir tenter de changer les choses, remettre un peu la France sur un chemin qui ressemblerait davantage à ce à quoi elle prétend, tolérance et générosité, liberté et fraternité, égalité et justice.
Aimer la France, en vérité je ne sais pas bien ce que cela peut signifier, sinon dire justement qu’elle ne serait pas diverse et multiforme, dans sa population comme dans ses lois et ses coutumes, ses croyances et ses traditions, dire qu’elle ne serait pas en évolution constante mais figée à jamais sur ce reflet d’elle-même qu’elle aime tant, cette France bien catholique, bien blanche et bien sûre d’elle-même et de son rayonnement. Et ainsi, proclamer son amour de la France et de ce qu’elle a toujours été – de ce qu’on voudrait qu’elle ait toujours été – revient en réalité à proclamer que l’on n’aime pas ce qu’elle devient, ou du moins que l’on en a peur.
Où l’on comprend donc qu’un petit bonhomme nous faisait simplement l’aveu de son indécrottable conservatisme, terreau de toutes les crispations qu’on lui connait. Ce qui conduit directement à cette question : Aimerions-nous la France de Nicolas Sarkozy ?
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On parle de : Sarkozy, l’Amour et la France