Emeutes à Villiers-le-Bel :
l’échec flagrant d’une politique de droite
Il y a deux ans, le 23 novembre 2005 et après trois semaines d’émeutes dans toute la Franc, un rapport de synthèse est rédigé par les Renseignements Généraux – rapport publié intégralement par le journaliste David Dufresne dans son ouvrage « Maintien de l’ordre, enquête« , publié chez Hachette littérature. En conclusion, le rapport des RG indique qu’« il est à craindre désormais que tout nouvel incident fortuit (décès d’un jeune d’un quartier) ne provoque une nouvelle flambée de violences généralisées. »
Deux ans ont passé, deux jeunes hommes sont tués à Villiers-le-Bel alors que leur mini-moto s’est encastrée dans un véhicule de police et personne n’est surpris d’assister à une nouvelle poussée de violence émeutière, ni même de constater qu’un palier supplémentaire semble avoir été franchi dans cette violence : des coups de feu sont tirés contre les forces de police, laquelle parle d’un « climat quasi-insurrectionnel » dirigé « contre les institutions de la République » .
On peut sans risque parier que notre Petit Président va s’empresser de revêtir son costume de Margaret Karsher et multiplier les déclarations tonitruantes et les rodomontades, pour opposer comme à son habitude à la crise son habileté de communicant. Il va jouer de la fibre compassionnelle auprès des victimes, parler rétablissement de l’ordre républicain et justice implacable, se montrer beaucoup, être partout, parler beaucoup, occuper tout l’espace médiatique et annoncer très probablement un Plan Marshall pour les Banlieues.
Il ne peut pourtant faire oublier que cette nouvelle flambée de violences généralisées, annoncée depuis deux ans par tous les observateurs et acteurs du terrain – associations et acteurs sociaux, policiers et élus locaux – n’est rien d’autre que le résultat de sa politique, celle qu’il a portée en tant que Ministre de l’Intérieur, celle qu’il a soutenue en tant que Président de l’UMP, celle qu’il a promise en tant que candidat à la présidence de la République et celle qu’il poursuit envers et contre tous en tant que Président de la République : une politique de compassion et de communication, une politique de répression et d’abandon, une politique d’inspiration libérale tournée vers les couches sociales les plus favorisées, une politique de droite… et qui a lamentablement et dramatiquement échouée.
Mais elle a échoué parce qu’elle n’a rien tenté, parce que l’objectif de la politique de Sarkozy n’est pas la justice sociale, elle n’est pas même d’apaiser les tensions issues d’injustices sociales qui ne font qu’aller s’accroissant. Il s’agit au contraire de les exacerber et de provoquer l’émotion dans la population des classes moyennes, peur et colère, pour s’en assurer le soutien. Il s’agit in fine d’établir une République de la loi du plus fort en exaspérant la désespérance des plus faibles. Il s’agit d’organiser et de circonscrire le chaos, et brandir la menace de sa généralisation, pour obtenir de la masse silencieuse un soutien résigné, poings serrés et têtes basses, à une politique économique qui favorise les nantis, distribue de rares miettes aux petites gens et abandonne à leur misère… les miséreux.
La révolte et les violences ne sont que la résultante ultime de cette politique-là qui coupe les crédits aux associations de terrains, qui méprise les acteurs sociaux, qui éloigne les services publics des zones dites sensibles, qui diminue les effectifs d’enseignants dans les écoles, qui supprime la police de proximité, qui se préoccupe d’abord du pouvoir d’achat des plus riches, qui préfère chasser le sans-papier plutôt que le trafiquant de drogue – et je ne parle pas du petit dealer -, qui choisit la communication plutôt que l’action. Bref, une politique qui privilégie la répression et ignore la prévention, une politique qui parle de maintien de l’ordre et qui en réalité organise le désordre, afin de mieux le brandir comme une menace sous le nez des « braves gens » qu’on pousse à craindre que leur soit arraché le peu qu’ils ont et oublier de réclamer pour eux-mêmes ce qu’on accorde à ceux qui ont déjà beaucoup.
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Soyons clair, il est parfaitement inadmissible de s’en prendre avec violence aux forces de police ou de casser des vitrines, et si le rôle d’un ministre de l’Intérieur est de faire en sorte de mettre les forces de l’ordre en situation de mettre fin à de tels agissements lorsqu’ils se produisent, et d’en arrêter les auteurs afin de permettre à la Justice de les juger, son rôle est aussi – et d’abord ! – de faire en sorte que de tels agissements ne se produisent pas. Il ne s’agit pas uniquement de rétablir l’ordre, mais de faire en sorte qu’il puisse se maintenir et perdurer. Il s’agit d’apaiser les tensions plutôt que de les exacerber. Or provocations, injustices, restrictions des libertés et soupçon généralisé ont été les instruments de la politique exclusivement répressive de Nicolas Sarkozy. Or provocations, injustices, restrictions des libertés et soupçon généralisé sont sources de tensions et de colères, en particulier parmi des populations qui vivent déjà l’exclusion sociale – car les exclure en sus de la citoyenneté est alors rajouter de l’injustice à l’injustice et fait nécessairement bouillir la marmite de la révolte. Et quand la révolte est le fruit d’une politique révoltante, le responsable de la révolte est l’instigateur et le grand ordonnateur de ladite politique.
Aux juges donc de sanctionner les auteurs des troubles à l’ordre public, aux électeurs de sanctionner le fauteur de troubles et de l’empêcher de conduire plus avant son entreprise de démolition du ciment républicain. Car comment imaginer aujourd’hui que, s’il devait se poursuivre cinq autres années, ce face à face entre Nicolas Sarkozy et une population qu’il n’a de cesse de stigmatiser et de provoquer ne puisse à terme trouver issue dans un dramatique embrasement ?
Malheureusement, la question reste posée. Malheureusement, Nicolas Sarkozy poursuivra dans la voie politique de la casse sociale et du désordre républicain, qu’il organise au seul profit des classes dirigeantes dont il est le bras armé.
et puis, et puis, une vidéo-amateur contredit la version de la police sur l’accident de Villiers-le-Bel … qui prend un certain relief avec émeutes de banlieue : des JT à mémoire variable .
permalien de l’article : Répression partout, Injustice sociale