Mar 012010
 

ségolène yeux fermésOn m’a souvent interrogé, avec plus ou moins de ménagement, sur le pourquoi de mon acharnement contre Ségolène Royal.

J’ai souvent expliqué que si acharnement il y avait, il était purement politique.

J’ai quelque fois concédé, aussi, que cela m’amusait de faire réagir les porteurs de cruche, tous ces thuriféraires censeurs aussi bien qu’encenseurs, prompts à voler au secours de leur égérie forcément maltraitée, nécessairement victime. Il y a de petits plaisirs dont on ne verrait pas bien l’utilité de se priver.

L’argument politique est pourtant bien celui qui l’emporte. Et la dernière livraison Viavoice-Libération (pdf) me fournit l’opportunité d’y revenir.

Un des chapitres de cette étude s’intéresse à l’opinion que les français ont des personnalités de l’opposition. On y apprend que Dominique Strauss-Kahn est celle qui recueille le plus fort taux d’opinions positives (58%), devant Bertrand Delanoë (56%), Martine Aubry (47%) et François Hollande (41%). Ségolène Royal occupe quant à elle une très modeste 10ème place avec 33% d’opinions positives, juste derrière Laurent Fabius (34%).

Là n’est pas le point, car un tiers d’opinions positives, si ce n’est pas – et de loin – faramineux, c’est encore un score honorable. Un score qui éventuellement, s’il n’y avait plus grave, permettrait de fonder quelque espoir quant à un avenir présidentiel – et l’on sait que Ségolène Royal est très préoccupée par un tel avenir.

Mais voilà, si l’on se penche sur les opinions négatives, le problème Royal devient patent : 63% des français expriment une opinion négative à l’égard de Ségolène Royal. Un score qui la place tout bonnement en queue de peloton. Et de très loin puisque Laurent Fabius, qui là encore là précède immédiatement, creuse un écart conséquent de 9 points.

On croit savoir que Laurent Fabius a – enfin ! – compris qu’un tel rejet était, dans une perspective présidentielle, un handicap tout à fait rédhibitoire, au point qu’il était préférable de devoir y renoncer. Politiquement, la question n’est pas même de savoir si ce rejet est justifié ou non, s’il repose ou non sur une réalité ou sur son image (plus ou moins) déformée, le fait est qu’il ne saurait y avoir de rencontre majoritaire entre un peuple et un homme – une femme en l’occurrence – qui est jugé négativement par deux électeurs sur trois.

C’est qu’il ne s’agit pas seulement de figurer honorablement lors d’un premier tour. L’essentiel est de parvenir à l’emporter au second. Tel est le problème de Ségolène Royal, qu’elle veut à toute force ignorer. Telle est mon problème avec Ségolène Royal, que je refuse pour ma part d’ignorer : elle n’a pas la capacité de gagner le second tour – le seul qui compte – d’une élection présidentielle.

C’est même plus profond que ça. Car d’une part Ségolène Royal veut à toute force faire fi de cette dure réalité, et d’autre part, aussi mal-aimée soit-elle, on ne peut nier qu’elle sait également se faire aimer. Et ce tiers qui la soutient et ne suffira pas à lui faire gagner l’élection, la soutient avec une force qui pourrait suffire à la porter jusqu’à la candidature, c’est-à-dire donc jusqu’à une nouvelle défaite de la gauche.

D’où l’importance de casser cette possibilité, de briser dans l’oeuf l’éventualité d’une candidature qui ne saurait être que désastreuse.

Ce à quoi je tente en effet de contribuer depuis le lendemain même de la dernière élection présidentielle, après ces quelques mois durant lesquels je n’avais pourtant pas ménager ma peine pour contribuer à une victoire à laquelle je voulais croire, malgré tout et au-delà de ce que déjà ma raison me soufflait.

Et Ségolène Royal était alors au faîte de sa popularité, et suscitait un rejet qui pour être inquiétant, déjà, n’était pas encore si écrasant qu’il l’est devenu.

Mais complétons ce panorama et renvoyons Ségolène Royal à ce qu’elle devrait pouvoir observer depuis cette dernière place et ses 63% d’opinions négatives : Dominique Stauss-Khan ne recueille que 30% d’opinions négatives et Bertrand Delanoë 33% ; Benoit Hamon 32% et Vincent Peillon 35% ; Daniel Cohn-Bendit 40% et Cécile Dufflot 23% (mais seulement 22% d’opinions positives : 51% ne la connaissent pas)…

Pis encore : Nicolas Sarkozy, président de la République particulièrement mal-aimé des français, fait mieux qu’elle en terme d’opinions positives : 41% (8 points au-dessus du score de Ségolène Royal), et mieux également en terme d’opinions négatives : 57% (6 points en-dessous du score de Ségolène Royal).

Et pourtant Ségolène Royal s’acharne à vouloir remettre le couvert.

Et c’est pourquoi, donc, je m’acharne et je m’acharnerai pour qu’elle ne puisse de nouveau être candidate. Ce n’est pas contre elle, pas personnellement contre elle. Il ne s’agit que de l’intérêt de la gauche toute entière, c’est-à-dire de tous ceux qui pour être dans la difficulté ont intérêt à ce que la droite soit battue, Nicolas Sarkozy très probablement, n’importe quel autre qui conduira la même politique, de toutes les façons.

Permalien : Ségolène Royal, la mal-aimée