Nicolas Sarkozy ce matin sur France Inter était tout content de l’annonce qu’il s’empressait de faire en exclusivité :
« A la demande de l’Etat français, ArcelorMittal va investir maintenant 17 millions d’euros à Florange (…) et le deuxième haut-fourneau repartira au deuxième semestre ».
Sur ces 17 millions, deux millions seraient consacrés à « réaliser les travaux » sur le deuxième haut-fourneau du site afin de permettre son redémarrage. « Si on ne fait pas les travaux sur le haut-fourneau de Florange, il ne pourra pas repartir. »
Un petit article sur France TV éclaire bien les choses.
D’abord un petit résumé de la situation à Florange :
Le groupe sidérurgique ArcelorMittal emploie 2 667 personnes à Florange, dont environ 500 pour le haut-fourneau qui fait l’objet depuis plusieurs mois d’un arrêt temporaire, au motif d’une demande en acier insuffisante. Les salariés craignent que cela ne se transforme en arrêt définitif. ArcelorMittal a en effet décidé récemment la fermeture définitive de hauts-fourneaux à Liège (Belgique) et Madrid (Espagne).
Ensuite :
Si ArcelorMittal confirme que deux millions d’euros serviront à « des travaux de maintenance afin de permettre un redémarrage » au second semestre du deuxième haut-fourneau de Florange, le même y met une condition : « La perspective d’une reprise économique. » En clair, si la reprise n’est pas constatée, le deuxième haut-fourneau restera à l’arrêt.
Mieux encore :
Selon le député (PS) de Moselle Michel Liebgott, élu dans la circonscription de Florange, ces deux millions « ont déjà été négociés par l’Etat en compensation du chômage partiel qu’il paye depuis le début de l’année ».
De son côté, Edouard Martin, un des responsables syndicaux (CFDT) du site, a lui aussi souligné que ces deux millions d’euros étaient « déjà prévus ».
Et les quinze millions restants ? Nicolas Sarkozy a lui-même fait le détail : « Sept millions d’euros vont être investis dans un nouveau gazomètre pour la cokerie à Florange, et huit millions d’euros seront investis afin de développer de nouveaux produits à Florange, destinés, sans rentrer dans les détails, au marché de l’automobile. »
Mais voilà :
Concernant les 7 millions destinés à la cokerie, « cela n’alimente pas forcément les hauts-fourneaux de Florange. La cokerie tourne encore actuellement alors que les hauts-fourneaux sont à l’arrêt. »
Et concernant les 8 millions destinée au développement de produits pour le « marché de l’automobile » vise un « secteur qui n’a jamais été menacé », selon le député Michel Liebgott, également président du groupe d’études Sidérurgie et fonderie à l’Assemblée nationale. Ces huit millions d’euros concernent « la filière froide, c’est-à-dire là encore une entité séparée des hauts-fourneaux, qui est d’ailleurs alimentée actuellement par de l’acier venu de Dunkerque. Et ces sommes étaient également prévues depuis plusieurs mois pour le projet Usibor [un acier allégé haut de gamme] ».
Résumons :
– 17 millions sont annoncés par Sarkozy ;
– mais 9 millions étaient déjà prévu par ArcelorMittal ;
– les 8 millions nouveaux concernent tout autre chose et ne sauraient permettre au haut-fourneau menacé de redémarrer, ni aux 500 salariés qui en dépendent de ne pas se retrouver au chômage d’ici quelques semaines – mais seulement après les élections ;
– seuls 2 millions seront consacrés à des travaux de maintenance du haut-fourneau ;
– ces 2 millions en particulier avaient déjà été négociés contre du chômage partiel ;
– malgré ces 2 millions consacrés à la maintenance du haut-fourneau durant son arrêt, son redémarrage reste conditionné par ArcelorMittal à une perspective de reprise économique ;
– sachant par ailleurs que la stratégie industrielle du groupe ArcelorMittal est bien connue : il s’agit de fermer l’ensemble des hauts-fourneaux d’Europe.
Et pour mémoire :
– il y a peu, Nicolas Sarkozy promettait aux salariés de Gandrange – ArcelorMittal déjà – que leur usine ne serait pas fermée ;
– aujourd’hui, le site de Gandrange n’est plus qu’un site industriel en friche ;
– les salariés ont installé uns stèle où l’on peut lire : « Ici reposent les promesses de Nicolas Sarkozy faites le 4 février 2008 : ‘Avec ou sans Mittal, l’Etat investira dans Gandrange’ ». Disait-il !
Que reste-t-il après ces éclaircissements de l’annonce exclusive de Nicolas Sarkozy faite ce matin et qui était censée selon lui « en enfumer réjouir plus d’un à Florange » ?