Je le confesse, je suis un lecteur assidu des blogs de la « vraie gauche ».
Pas seulement, je lis également les blogs traîtres à la gauche, les blogs sociaux-libéraux, les blogs alliés objectifs de la droite et du patronat, bref les blogs de gouvernement et qui prennent leurs ordres directement à l’Elysée – et je sais de source sûre, vous imaginez bien, que certains d’entre eux sont financés grassement via une caisse noire, et profonde, dont François Hollande possède la clé – une clé molle, et qui fait couac dans la serrure, bien entendu.
Je crois que j’ai utilisé tous les vocables convenus, mais ce n’est pas de cela dont je voulais vous parler.
Je lis les blogs de la vrauche, donc – cette gauche si tant satisfaite d’être vraie. Je lis assidument leurs écrits et suis régulièrement atterré par le vide abyssal de leur argumentaire politique : il est littéralement dépourvu de fond. C’est simple, de ce point de vue, on dirait des blogs de droite.
Deux sujets les occupent particulièrement. Quasi exclusivement, à vrai dire. Le premier consiste à démontrer que tout le monde fait rien qu’à dire que Mélenchon c’est le diable alors que c’est même pas vrai d’abord. Je ne vais pas m’étendre sur ce point, tant je pense qu’il est évident pour tout le monde, hors le dernier carré de fans, que Mélenchon est une cause perdue.
Pour le dire rapidement, tout de même, Jean-Luc Mélenchon est atteint du syndrome Ségolène Royal, une maladie politiquement mortelle. Mêmes causes (la frustration d’un parti qui n’a jamais voulu reconnaître ses talents, la candidature quasi inespérée à une élection présidentielle, une campagne grisante, des foules enthousiastes, des hordes de fans, l’auto-persuasion d’une victoire aussi promise que méritée, la défaite), mêmes effets (le déni d’une défaite, des responsabilités qu’on cherche ailleurs, l’amertume, l’aigreur, l’illusion d’un destin qui perdure, entretenue par un dernier carré de fans d’autant plus bruyants que leurs rangs se font clairsemés, et à la fin la chute qui ne surprend que celui qui tombe, tant tout le monde – hors donc le dernier carré – avait compris depuis longtemps que c’en était fini). Bref…
Le second sujet qui occupent de manière obsessionnelle nos petits camarades de la vrauche est le Parti Socialiste. Il s’agit de dire, de répéter, de brailler sur tous les tons que ce n’est pas un parti de gauche. Non non non, la vraie gauche, c’est eux ! On l’avait bien compris, mais il semble très important pour eux de le marteler, et de le marteler encore. A se demander s’ils en sont vraiment convaincus. C’est aussi qu’il semble bien, et ils le savent, que les électeurs eux n’en soient pas franchement convaincus, eux.
Le fait est que depuis plusieurs décennies, à chaque élection, la majorité des électeurs de gauche vote pour les candidats du Parti Socialiste. Sans doute pas parce qu’ils sont émerveillés par le positionnement politique du PS, mais vraisemblablement parce que c’est là encore qu’ils retrouvent le mieux la gauche telle que eux la conçoivent.
Nos petits camarades de la vrauche ne semblent pas vouloir comprendre que ce n’est pas en répétant encore et toujours que le PS n’est pas de gauche qu’ils vont parvenir à convaincre le peuple – celui de gauche – de s’en détourner, et mieux encore – rêvons un peu (ou pas) – de se tourner vers le Front de Gauche. Parce que la seule vérité de la gauche est que, quoi qu’en pensent nos chers camarades, son centre de gravité a toujours été, est et sera toujours là où les électeurs le positionne.
Et actuellement, et depuis donc quelques décennies maintenant, c’est au PS qu’on le trouve, ce centre de gravité de la gauche.
Que ce ne soit pas leur gauche, ils peuvent le clamer sur tous les tons, les gens s’en moquent. Au mieux. Au pis, ils prennent ça pour l’arrogance habituelle du gauchiste – c’est-à-dire de ce militant qui passe beaucoup de temps à affirmer que la vraie gauche, c’est lui. Une assertion qui en sus d’être gratuite, est parfaitement risible. Et vaine, aussi.
Ainsi, ils peuvent bien comme de sales gosses continuer à trépigner, à taper du pied et à se rouler par terre en braillant qu’ils sont la seule gauche qui vaille et que la Parti socialiste est très méchant pas de gauche mais de droite, ça n’aura jamais d’autre effet que de faire grossir leur propre auto-satisfaction de gauchistes. Et accessoirement de repousser un peu plus encore ce peuple dont ils aiment tant à se réclamer.
On peut se donner bien du plaisir en se masturbant, loin de moi l’idée de le nier. Cependant, si l’on souhaite concevoir, c’est tout de même assez peu performant.
Or voilà. Moi, ma gauche, elle aurait pour ambition de concevoir et elle s’en donnerait les moyens. Elle commencerait par arrêter la masturbation. Alors seulement on pourrait envisager, à terme, d’accoucher d’un monde meilleur, où les richesses – et pas seulement monétaires – seraient légèrement mieux distribuées.
Jean-Luc Mélenchon – faisons-lui le plaisir de personnifier un peu, mais il ne s’agit pas que de lui – parviendra peut-être, sans doute même, à détourner quelques électeurs du Parti Socialiste. Seulement voilà, ce n’est pas lui qui en tirera jamais les fruits. Pas cette vraie gauche autoproclamée. C’est que la branlette est rarement une arme de séduction.
L’aigreur non plus, mais c’est une autre histoire.