Avr 012010
 

Mystère bouffe, de Dario Fo, par Muriel Mayette, à la Comédie FrançaiseJe me garde ce billet sous le coude depuis bientôt une dizaine. A l’ennui éprouvé d’un bout à l’autre de cette pièce s’ajoute l’ennui d’avoir à en dire quelque chose.

Faisons court : en guise de mise en scène, une succession de stand-up – des jongleries, si l’on veut se la raconter troubadour – revisitants la religion façon peuple. Les prestations sont inégales, parfois excellentes parfois moins, mais on s’en fout tant le texte de Dario Fo, ainsi (mal) traité, a aujourd’hui perdu de son irrévérence, de sa charge provocatrice.

C’est chaque fois la même histoire quand la très respectable et très bourgeoise Comédie Française cherche à s’encanailler. Faute d’oser franchement, elle n’y parvient pas, demeure malgré tout très respectable et très bourgeoise. C’est qu’il ne saurait suffire d’adopter les manières du peuple – de ce qu’on s’imagine être le peuple – tant qu’il y manque l’esprit.

Il aurait fallu un public de curés et de bonnes soeurs pour que ce spectacle parvienne à déranger un tant soit peu quelqu’un – qui alors serait susceptible, peut-être, d’évacuer son malaise par le rire. Mais voila, aussi culs-bénits soit souvent le public de la Comédie Française, il ne l’est point assez encore qu’il se sente un tant soit peu violenté par un catéchisme passé à la moulinette scatologique.

C’est à se demander si, pour avoir choisi de faire entrer cette pièce au répertoire, en ce début de XXIème siècle, Muriel Mayette est consciente que le Paris d’aujourd’hui ne ressemble guère – du moins du point de vue du tabou religieux – à la Lombardie des années 50. Se rend-elle même compte qu’au moment même où elle pense nous faire rire avec un Christ qui glisse de sa croix, Plantu publie en Une du Monde un dessin autrement plus licencieux ?

Plantu, Pape, enfant, Le Monde du 28 et 29 mars 2010

Source : Mystère bouffe