Ça fait longtemps que ça dure. Déjà en 1998. Déjà avec Aimé Jacquet. Bon, il y avait Zidane. Et puis Blanc et Desailly. Et puis Thierry Henry, déjà. On ne peut pas perdre avec une telle équipe. Qu’importe le sélectionneur, on ne peut pas perdre. Pourtant les pires se sont succédés pour occuper le poste. Aimé Jacquet donc, et puis Roger Lemerre. Jacques Santini ensuite. Raymond Domenech enfin. Des clones sans charisme ni inspiration, dont l’unique credo est 1- conserver le ballon 2- ne surtout pas prendre de but. Et c’est ainsi que progressivement, à mesure que ces joueurs d’exception raccrochaient les crampons, l’équipe de France est devenue championne du Monde de la passe-à-dix.
Ainsi, le dernier match de l’avant Domenech fut la défaite en quart de finale de l’Euro 2004, contre la Grèce, 1 à 0, au terme de ce qui fut le match le plus ennuyeux et crispant de l’ère footballistique moderne – c’est-à-dire celle qui a débuté avec ma naissance. Suite à quoi, Domenech se mit au boulot : 1- conserver le ballon 2- ne surtout pas prendre de but, avec pour résultat qu’au terme d’un tournoi de qualification où l’équipe de France enchaîna les match médiocres, joua un sublime jeu de passe-à-dix, écrasa 1 à 0 les redoutables Iles Feroe, il fallut en passer par les barrages, puis par un dernier match qui s’éternisa 120 minutes afin de s’assurer de ravir la couronne de match le plus ennuyeux et crispant de l’ère footballistique moderne. Une victoire 1 à 1 comme les aime Domenech. Beau boulot Raymond !
Mais j’en entends dans le fond qui beuglent qu’on a tout de même été en finale de la dernière coupe du Monde. Et je réponds : Zinedine Zidane. Malgré Domenech et sa tragique absence d’ambition de jeu, Zinedine Zidane est parvenu à lui seul à conduire l’équipe de France jusqu’en finale de la coupe du Monde 2006 – et l’on se souvient d’une équipe du Brésil qui en demi-finale se contenta de regarder jouer Zizou, le souffle coupé et comme se retenant d’applaudir. En 2006, Zidane gagna la coupe du Monde et l’offrit sur un coup de tête à l’équipe d’Italie. Domenech ne fut jamais dans cette affaire qu’un spectateur de plus.
Il est à ce titre remarquablement symbolique que l’équipe de France ait été sortie de la dernière coupe du Monde après le coup de tête de Zidane pour quatre ans plus tard devoir sa qualification pour la suivante à un coup de main de Thierry Henry. Voilà bien quelle est l’équipe de France de Raymond Domenech : une équipe sans âme, qui ne cesse de déjouer, ou de jouer tout petit, à pas comptés et prudents, offrant pour tout spectacle que 90 minutes soporifiques et sans joie, et dont le dénouement n’est jamais dû qu’à des circonstances parfaitement hasardeuses, parfois favorables parfois non, sonnant systématiquemet le glas de défaites améres ou de tristes victoires.
On est qualifié. Soit. Mais putain ! qu’est-ce qu’on va encore s’emmerder pendant cette coupe du Monde en Afrique du Sud !
Vraiment, y a pas moyen de débarquer Raymond « la science » ? Qu’on en finisse enfin de ces dix longues années de football calculette à la main ? Et si cette qualification volée était l’opportunité de comprendre que le football ce n’est pas ça, tout de même, et que même la victoire peut être honteuse, désastreuse, moche. L’opportunité de virer enfin un Raymond Domenech, sélectionneur ennuyeux et crispant et qui n’est pour rien – cette fois encore – dans cette tant minable qualification. Bien au contraire. Oui, et s’il fallait prendre ce pitoyable dénouement comme le signe qu’il n’est peut-être pas utile d’aller jusqu’au bout d’une logique qui ne pourra jamais, tout compte fait, que tous nous désespérer ?
Source : Thierry Henry à pleine main