Pierre Salviac est journaliste sportif, spécialiste du rugby depuis des lustres, et jusque hier sur RTL. Dans ce rôle, je l’aimais plutôt bien. C’est-à-dire beaucoup plus qu’un Jean-Michel Larqué ou qu’un Thierry Roland, par exemple.
Il n’empêche, le tweet qu’il s’est permis de poster hier était d’une imbécilité crasse. « A toutes mes consœurs, baisez utile, vous avez une chance de vous retrouver première Dame de France », a-t-il écrit, pensant sans doute faire de l’humour. Le malheureux.
La réaction du directeur de l’information de RTL, Jacques Esnous, ne s’est pas fait attendre : « @pierresalviac Ton tweet est absolument intolérable. J’y vois un sexisme vulgaire inqualifiable que je condamne. »
C’était une saine réaction et une saine condamnation. On aurait pu attendre en sus qu’il demande à son chroniqueur de présenter des excuses, mais cela fut inutile, Pierre Salviac se repentant un peu plus tard de lui-même : « En balançant une vanne j’ai blessé mes consœurs. Je leur présente mes excuses et retire mon tweet ;-( »
On aurait pu en rester là. Mais voilà, on a pris en france la très sale habitude, ces dernières années, de couper des têtes. Il fallait punir, sanctionner, faire en sorte que le coupable expie sa faute, son péché. Et Pierre Salviac a donc été viré de RTL.
Inutile excès de zèle qui transforme le coupable en victime. Et déplace le débat du propos tenu à l’homme qui s’est cru autorisé à le tenir.
Quelqu’un a-t-il prévenu la direction de RTL que nous en avions terminé avec Sarkozy, que nous pouvions enfin revenir à un fonctionnement social normal et apaisé, plutôt qu’épidermique et délirant ?
Pierre Salviac a proféré une connerie. Que l’on condamne donc la connerie. Que l’on demande des excuses publiques, éventuellement. Que l’on réclame des explications, si nécessaire. Et si la connerie le justifiait, parce qu’il y aurait eu contravention à la loi, que la justice soit saisie et qu’une sanction proportionnée soit infligée – non pas au nom de la morale ou des valeurs, mais au nom de la loi. Simplement.
Qu’on comprenne enfin qu’il s’agit moins de condamner un homme et de le punir, que de dénoncer des propos qui, dans le meilleur des cas, relèvent de la blague de mauvais goût. Pierre Salviac a lui-même reconnu que, pis que cela, son propos était blessant. L’essentiel était alors acquis. Il n’était pas utile de s’empresser en sus de lui couper la tête et d’en faire la victime d’un système bien-pensant qui en guise d’auto-défense pratique la censure à coups de hache.
Qu’on veuille bien le comprendre une fois pour toute, les cons ne finiront par vraiment fermer leurs grandes gueules, non pas parce que nous aurions réussi à couper toutes les têtes de tous les cons, mais parce que l’intelligence l’aurait emporté sur la connerie. Ça promet de prendre un certain temps, mais il n’y a pas d’autre chemin que celui de l’intelligence.
« Sanction pour non respect de nos consoeurs et plus généralement des femmes. Pas de politique, juste la défense de nos valeurs », a écrit Jacques Esnous pour expliquer le licenciement du fautif. Je voudrais qu’il m’explique en quoi l’action de couper une tête parvient à prendre place dans son système de valeurs. On se gargarise aujourd’hui des valeurs, mais il ne s’agit en vérité de rien d’autres que de ce qu’on appelait auparavant les bonnes mœurs.
Ne serait-ce que pour la raison que chaque fois que vous coupez la tête d’un con ce sont dix qui repoussent aussitôt, il n’y a d’autre choix que de s’efforcer de complexer les cons, plutôt que de céder à la tentation de leur couper la tête.
Nous nous sommes débarrassé de Sarkozy. Reste encore à se débarrasser du sarkozysme. Et quand on apprend que l’UMP s’est choisi pour slogan de campagne des législatives un Choisissons la France dans lequel on entend très clairement sonner en creux les thèmes de l’anti-France et du parti de l’étranger, qui s’adresse évidemment à la gauche, on se dit que là aussi la route promet d’être longue.